Deux grenoblois dans le sud

Deux grenoblois dans le sud

2024 : Le carnaval de Dunkerque

 

Le Carnaval de Dunkerque est un événement annuel haut en couleurs et en festivités qui mérite le détour. C’est pour moi le meilleur carnaval car unique, populaire, dans le sens noble du terme, et qui met à égalité tout le monde, plus de différence entre Monsieur tout le monde habitant en HLM et le PDG d’une grosse société. L’âge, le travail, la classe sociale n’ont pas d’importance dans la Bande, on peut être des amis proches au carnaval et ne pas se fréquenter dans la vie. Le carnaval est une grande famille et pas question de manquer ce rendez-vous.

 

L’année où j’ai fait le carnaval de Dunkerque, nous avions rencontré le maire d’une commune limitrophe, ami de mes amis, qui s’était mis « en pause » de son mandat de maire, laissant place à son premier adjoint pour 3 jours afin de participer au carnaval sans contrainte, ce qui n’est pas banal...


Les origines du Carnaval de Dunkerque remontent au XVIIe siècle, où les pêcheurs et marins dunkerquois avaient pour coutume de célébrer le départ en mer pour plusieurs mois de pêche. Les festivités marquaient ainsi le début du carême et permettaient aux habitants de s'amuser avant la période de restrictions alimentaires. Le premier document officiel connu parlant de ces festivités est une ordonnance du Magistrat datée du 16 janvier 1676 qui réglementait les festivités.


Pour être un "vrai" carnavaleux, il est d’usage d’être déguisé, muni d’un haut parapluie de couleur (berguenaere), et de connaître les chansons chantées lors des défilés et des bals, dont évidemment l'Hommage au Cô et la cantate à Jean Bart.

 

Ce carnaval il ne se découvre pas, il se vit et pour ne pas gâcher la fête, il existe un certain nombre de règles qui le régissent et que l’on se doit de respecter, à commencer par la charte du carnaval. Ce joyeux désordre est en réalité très encadré et très bien organisé… "carnavaleux respectueux, carnavaleux heureux"...


Les "Trois joyeuses" période spéciale du Carnaval de Dunkerque se déroule sur trois jours consécutifs, cette année du 11 au 13 février. Ces journées festives marquent le point culminant des célébrations carnavalesques et attirent de nombreux participants et spectateurs venus de la région et d'ailleurs.

 

Le Carnaval de Dunkerque comprend de nombreux événements et activités festives, à commencer par Les Chapelles qui sont des bals costumés qui ont lieu dans différentes salles et lieux de Dunkerque et environs proches, organisés par de nombreuses associations ou des particuliers. On "fait chapelle" mais on n'y entre que si l’on y est invité et il faut bien souvent un mot de passe... (du moins, à l’époque où je l’ai fait). Soit on connaît l'hôte, soit celui-ci nous laisse entrer lorsqu'on arrive avec un de ses invités que l'on connait, mais pas d'entrée en force… 

 

Ces bals sont l'occasion pour les carnavaleux de se retrouver, de danser et de célébrer dans une ambiance conviviale et festive. Chacun a revêtu son clet'che, traditionnel habit du carnavaleux, puis ce sont des défilés de chars, des concerts, des concours de déguisements et des animations pour les enfants. Les festivités durent plusieurs semaines, avec pour cette année 2024, clôture le 7 avril… A noter que les bénéfices de tous ces bals sont généralement reversés aux associations.

 

Les bandes : Les participants se déguisent et se masquent pour prendre part aux festivités derrière l’un des symboles du Carnaval, la "bande de Dunkerque". Il s'agit d'un groupe de participants costumés qui défilent en musique dans les rues de la ville. La bande est suivie par des groupes de musiciens (la clique) et de tambours, dont le célèbre tambour major, figure dunkerquoise, créant une atmosphère unique et festive. Le tambour-major dirige la musique et choisit le parcours avec les autorités, suivent les tambours derrière le tambour-major, puis les fifres, et enfin les cuivres et les grosses caisses. Lorsque les fifres jouent, les carnavaleux avancent en marchant doucement. Lorsque les trompettes jouent, alors a lieu un chahut. Les premières lignes ont pour but de retenir les carnavaleux, organisés eux aussi en lignes, poussant de bon cœur. Au cours de la bande, hormis lors des arrêts de la bande, la clique ne joue pas lors de la chanson "Putain d'Islande" et l'Hommage au Cô joué lorsque la bande arrive dans la Rue Cô Pinard :

 

Sous le nom de Cô-Pinard II, Jean Minne a été le tambour-major de la Visscherbende de Dunkerque de 1959 à son décès en 1988. Respecté de tous les carnavaleux, "le Cô" marchait fièrement en tête de la bande, guidant la musique avec fermeté, suivi par la foule des masques. Un hymne lui est dédié, composé après sa mort par Pascal Caulier. Il est depuis repris en chœur, avant la "Cantate à Jean Bart", à la fin de chaque rigodon et dans les bals du carnaval :

 

Salut à Cô-Pinard, salut à ta mémoire

Là-haut, tout près d'Jean Bart, c'est ta gloire,

Tant d'années à nous guider, tant de masques à aimer

A c't'heure nous voilà tous en pleurs.

 


Pendant les Trois joyeuses, la ville de Dunkerque est en effervescence avec des défilés et des cortèges colorés, des bals costumés, des concerts, des animations de rues, et bien sûr, l’emblématique lancer de harengs. C’est le moment où l'ambiance festive et joyeuse du Carnaval de Dunkerque atteint son apogée, avec une atmosphère de liesse et de convivialité qui anime toute la ville. C'est l'occasion pour les habitants et les visiteurs de se retrouver, de partager des moments de joie et de profiter de cette tradition séculaire qui fait la renommée du carnaval dunkerquois.

 

Il est donc de tradition de converger vers la mairie dans la joyeuse bande, où le maire depuis le balcon de l’hôtel de ville, lance des harengs vers la foule rassemblée en bas, qui scande haut et fort "libérez les harengs". Le lancer de harengs par le maire est une tradition récente (1988) mais bien ancrée, attendue et appréciée par les Dunkerquois et les visiteurs, car il illustre l'implication des autorités locales dans cette tradition ancestrale et populaire et renforce le lien entre la municipalité et la communauté dunkerquoise, à la fois hommage à l'histoire maritime de la ville, manifestation de générosité envers la population locale et un moment de joie et de célébration pendant le Carnaval.

 

Mais attention, ce n'est pas fini : après ce moment clef du carnaval, à 19h, c’est l’heure du Rigodon, autre moment phare du carnaval. C’est la convergence de tout ce monde enjoué vers la place Jean Bart, lieu de rassemblement et de commémoration, pour d'abord tourner autour du kiosque au son de la musique de la bande, dans un joyeux chahut puis ensuite entourer symboliquement la statue de l’illustre corsaire dunkerquois (1650-1702), connu pour ses exploits en mer et sa bravoure lors des combats navals contre les ennemis de la France et ensemble entonner l'Hymne à Jean Bart, "la" chanson du Carnaval de Dunkerque. Cet hymne est chanté en chœur avec passion et émotion, ce qui contribue à créer une atmosphère très chaleureuse et particulièrement émouvante… 

 

Jean Bart, salut, salut à ta mémoire

De tes exploits, tu remplis l’univers

Ton seul aspect commandait la victoire

Et sans rival tu régnas sur les mers

Jusqu’au tombeau France mère adorée

Jaloux et fier d’imiter sa valeur

Nous défendrons ta bannière sacrée

Sur l’océan qui fût son champ d’honneur (bis)

Jean Bart, Jean Bart, la voix de la patrie

Redit ta gloire et ton nom immortel

Et la cité qui te donna la vie

Erigera ta statue en autel (bis)

 


Au fil des siècles, le Carnaval de Dunkerque est devenu une tradition incontournable pour les habitants de la ville et attire également de nombreux visiteurs venus découvrir cette ambiance unique et chaleureuse. Son caractère joyeux, festif et participatif en fait un événement emblématique du patrimoine culturel du Nord de la France.

 

J’ai eu la chance de participer une fois dans ma vie à ce carnaval magique, j’avais une trentaine d’années, en 1990, hébergée chez mes amis dunkerquois, et j’ai profité de nombreuses réjouissances "de l’intérieur" : on danse beaucoup, on rit beaucoup, on chante beaucoup de chansons paillardes, on mange des kilos de moules frites, on boit des litres de la spécialité ch’tie à base de houblon, et on dort très peu mais franchement c’est inoubliable ! … Une semaine de bonheur dans un autre monde suivie, à mon retour à Grenoble, d’une autre semaine de vacances / récupération pour m’en remettre !

 

Le moment le plus festif reste pour moi les 3 joyeuses et le moment le plus émouvant, l’hymne à Co Pinard et la cantate à Jean Bart au milieu d’une foule recueillie, agenouillée, tous les carnavaleux se tenant la main. Impressionnant, frissons garantis… C’est la fête la plus géniale à laquelle j’ai participé … la réputation des gens du Nord n'est pas vaine, il règne de la convivialité, de la chaleur, de l'amitié, dans ce carnaval hors norme….  A faire au moins une fois dans sa vie !



Voici une vidéo un peu plus longue qui vous raconte le carnaval de l'intérieur, et l’envers du décor de cet incontournable festival de couleurs … Cette vidéo reflète parfaitement ce que j'ai vécu ! Mémorable. 

 



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02/03/2024
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